Avril 2011 – (Im)pitoyable Télé !
Les 29 et 30 avril 2011, l’antenne Acat de l’Institut Saint-Michel de Verviers investissait pour la deuxième fois de son histoire le hall des sports de l’école, pour y présenter son nouveau spectacle : (Im)pitoyableTélé !
Ce spectacle concrétisait le projet annuel des 90 étudiants, membres de l’antenne, qui, depuis l’année scolaire précédente déjà, n’ont compté ni leur temps ni leur énergie pour assurer avec brio une création inédite et originale faisant appel à des moyens techniques professionnels (éclairage robotisé, effets pyrotechniques, écran vidéo géant…).
C’est vrai que le défi était de taille puisqu’il s’agissait de recréer l’atmosphère d’un véritable plateau de télévision avec tout le faste et le strass qui sont de mise en l’occurrence ! En avril 2008, au lendemain du spectaclePrisme, marqué par le sérieux de son thème et la sobriété de sa mise en scène, j’avais, en effet, annoncé mon intention de revenir avec un show flamboyant et éclatant tout en restant fidèle à l’esprit de l’antenne Acat. Entrer dans l’univers (im)pitoyable de la télévision permettait de rencontrer l’objectif artistique sans trahir les valeurs fondamentales de l’antenne. Car la dignité des hommes et des femmes peut se voir malmenée autrement et bien plus malicieusement que par la matraque etla torture. Ainsi en va-t-il de la télévision qui, trop souvent, agresse et abîme ce qu’il y a de plus beau et de plus noble en l’être humain. Et quel que soit le côté où l’on se situe, devant ou derrière, la télévision peut se révéler comme une véritable machine à broyer et à enchaîner.
C’est ce qu’ont pu découvrir et, d’une certaine façon, expérimenter, les 700 personnes qu’ont réunies les deux représentations d’(Im)pitoyableTélé ! Durant plus de deux heures trente, les spectateurs, tantôt invités à participer activement à l’enregistrement en direct d’un « prime », tantôt transformés en témoins privilégiés de ce qui se vit et se dit dans les loges au moment où défilent les spots publicitaires sur les écrans de nos chaumières, ont été emportés par l’histoire de ces deux animateurs au faîte de leur gloire, qui présentent avec fracas et paillettes leur émission hebdomadaire, La Grande Parade. Et tout se passe pour le mieux jusqu’au moment où l’un des deux, à la suite d’un dialogue avec une invitée inattendue, se remet en question, ose un face-à-face sans fard et artifices avec lui-même, pour finir par décrocher et retrouver une vie en harmonie avec son moi profond. Deux parcours de stars portés par une mise en scène soignée et somptueuse, qui alterne subtilement le théâtre, le chant, la danse et les diaporamas.
Bref, du divertissement à l’état pur, pour le plaisir de tous, mais du divertissement intelligent puisqu’au final chacun aura pu prendre conscience du processus d’identification mis en place par une télévision racoleuse qui n’offre que jeux débiles et programmes médiocres, télé-réalités en tête. Processus bien huilé par lequel les téléspectateurs ont l’impression d’être, d’exister, fût-ce par procuration, et de décider. Alors que tout est déjà joué. Ailleurs. Là où se comptent les parts de marché et les recettes publicitaires. Car la télévision, sous son voile éblouissant et son côté séducteur, se révèle un système implacable, régi par la seule loi de la rentabilité, qui sacrifie sans avertir et sans pitié ceux et celles que, hier encore, elle encensait et portait aux nues.
Je terminerai en soulignant combien un tel projet exige un nombre d’heures considérable à sa réalisation, qu’il vaut mieux, du reste, ne pas compter. Le temps passé n’est pourtant rien face à la formidable aventure humaine qu’il permet de vivre. Au cours des longs mois de préparations et de répétitions, il permet de tisser de nouvelles relations et de se découvrir autrement. De véritables talents, insoupçonnés jusqu’alors, se révèlent et des personnalités éclosent littéralement. En tant que professeur, j’ai pu faire passer un message et communiquer des valeurs qu’il m’aurait été impossible de transmettre par le truchement ordinaire des cours. Mais surtout,un tel projet permet à chacun d’être l’homme ou la femme qu’il est vraiment, avec ses richesses et ses fragilités, en participant à la construction d’une œuvre qui n’existera que parce que chacun aura apporté sa pierre à l’édifice.Bien que je n’en sois pas à mon premier spectacle avec l’antenne Acat, je reste émerveillé par l’esprit positif de tous ces jeunes qui se respectent et se soutiennent mutuellement, qui ne ménagent pas leurs efforts pour apporter et donner le meilleur d’eux-mêmes et qui partagent ce qu’ils sont sans compter. Si parfois au cours d’un tel projet la fatigue gagne, si le découragement guette, si le doute fait vaciller, la flamme qui brille dans leur regard est une force inouïe pour se dépasser et continuer.
Je ne sais, à ce stade, de quoi seront faits les projets futurs de l’antenne Acat (cette année pourrait connaître une reprise à l’extérieur de l’école d’(im)pitoyable Télé !), mais assurément les fruits récoltés à ce jour ne peuvent qu’engendrer de nouvelles semailles.
Jean-Claude Lemaître – professeur de religion – responsable de l’antenne Acat-ISM
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